Le vent soufflait doucement, pourtant, chaque bourrasque était glaciale. Le sol enneigé, les toits blancs, oui, l'hiver était arrivé avec sa couverture éclatante qui, à chaque inspiration que tu prenais, te brûlait la gorge. Tu étais couverte, peut être pas assez, mais tu ressentais le froid comme jamais : Il s'infiltrait dans tes narines, passait dans ta gorge comme un fer rouillé brûlant puis se déposait le long de tes poumons, rendant ta respiration difficile. Tu cherchais un endroit chaud du regard puisque ce satané bus n'arrivait pas. Quelle idée de sortir par un temps pareil ! Mais tes résultats étaient arrivés au laboratoire, ce n'était pas imaginable d'attendre plus encore. Les lumières des phares du bus se distinguèrent, et un soupir de soulagement sorti de ta bouche. Tu pris place dans le véhicule, frotta tes mains l'une contre l'autre pour les réchauffer. Elles étaient si rouge, si douloureuses... Comme ton ventre, qui te torturait à cause du stress que tu lui imposais. Allez, n'aie pas peur, ce ne sont que des résultats sur un papier ! Pas de quoi paniquer ! Mais tu ne voyais pas cela ainsi. Tes ongles étaient dans un état pitoyable. Toi qui avais tant lutter pour arrêter de les ronger ! Les larmes menacent tes yeux. Oui, tu es malheureuse de n'avoir personne à tes côtés. Ton regard s'effaçait pour partir au loin. Si bien que tu faillis rater ton arrêt. Mais, très vite, le monde reprit le dessus sur tes pensées, et tu marchais vers la clinique, pour te rendre au laboratoire où tu demandais tes résultats.

L'enveloppe en main, tu n'osais pas l'ouvrir. L'infirmière te fit un grand sourire d'encouragement, et tu glissais un doigt pour ouvrir l'encoche. Lentement, tu sortis la lettre et la déplia : Après des résultats incompréhensibles, tu regardais la conclusion, et t'effondrais sur une chaise. Tu tremblais de tout ton être, l'information passait et repassait dans ton esprit : Enceinte. Tu étais enceinte. Et toute l'équipe du laboratoire semblait ravi pour toi. Le problème était que toi, tu pleurais de panique, et pas de bonheur. Tu sors presque en courant, la main sur le ventre, et une fois dehors, les pieds dans la fine couche de neige, tu hurles, tu hurles tout ton inquiétude. Il n'était pas censé être ici, cet enfant... Tu n'avais pas prévu cela, jamais. Ce n'était pas que tu ne souhaitais pas d'enfants. C'était simplement que tu n'en voulais pas si tôt, mauvais timing, que tu ne savais pas comment s'en occuper, ton père étant mort depuis longtemps, pas de grand père pour le bambin, mais surtout, que tu ne voulais pas de CE père pour ton enfant.

Tu n'avais plus qu'a rentrer chez toi maintenant, fini les soirées, fini le café, fini la liberté. Tu ne devais plus penser pour un, tu devais penser pour deux. tu commençais à marcher pour rentrer, mais tes pas étaient si lourds.. Le bus n'était pas loin, alors, tu te dis que ce serait plus simple de monter au chaud. Alors, tu montais. Et tu restais debout. Sans sourire. Sans émotion si ce n'est un visage impassible. Tu as froid, encore. Et des nausées, toujours. Tu veux vite rentrer. Vite te reposer. Vite oublier. Mais tu ne pourras pas oublier, au fond de toi, cette idée s'est ancrée, pourtant, tu voudrais tant la retirer... Tu sortis pour rentrer chez toi. Dans ton petit appartement, tu te demandais comment tout réorganiser. Parce qu'il était là maintenant. Hors de question de le retirer, hors de question de l'abandonner. Tu attrapais ton téléphone afin de trouver le numéro. Tu appuyais sur la touche, préférant te débarrasser maintenant de ce fardeau avant de ne plus avoir le courage. Tu t’éclaircissais la gorge et attendis sa réponse. Un léger « Allô » et tu balançais comme ça, comme si tu lançais une arme mortelle : « J'attends un enfant. De toi. » Il n'osait pas répondre, il avalait doucement la pilule. Comme toi tu l'avais fait quelques dizaines de minutes auparavant. Puis, il répondit qu'il arrivait. Tu refusais, tu ne voulais pas le voir, pas le courage de l'affronter. Mais il était décidé, têtu. Impossible de lui faire changer d'avis. Tu paniquais à l'idée que ton enfant, votre enfant se retrouve avec ce trait de caractère. C'était effrayant. Terrifiant. Horrible. Insurmontable. Ton reflet dans le miroir semblait si fatigué, si dépassé, si... Il ressemblait à un fantôme. Une partie de toi avait disparu, et rien pour la remplacer pour le moment. Tu te déplaças vers le réfrigérateur, affamée et jeta sushi, cafés, alcool, et toutes substances nocives pour ton enfant. Premier réflexe de mère, tu te dis. Pourquoi donc faire cela si tu ne voulais pas t'avouer que tu étais enceinte ?! Tu voyais la réalité des choses, dans le fond, même si elle te rendait folle, cette réalité, tu n'avais pas le choix, c'était ton destin, les dés étaient lancés, et le jeu était fait : le retour en arrière n'était pas possible. Tant pis. Trop tard. Il te fallait assumer dès maintenant.